16 novembre 2005

C'est la racaille, eh bien, j'en suis !

Avant-hier, le président de la République nous a fait un beau discours. Il a dit aux jeunes qu’ils étaient les enfants de la République et c’était la chose à dire depuis si longtemps. Je l’aurais cru plus sincère s’il l’avait dit plutôt ! Il a fait auparavant une lourde allusion à l’immigration clandestine, s’il y a un rapport, il me semble éminemment suspect. Enfin à la fin il a précisé que les actes devaient être en accord avec les paroles. Venant de Chirac chacun sait depuis des années à quoi sans tenir.
Hier le parlement a voté l’état d’urgence pour trois mois. Il n’y avait presque personne dans l’hémicycle, c’est dire que les députés croient au péril qui nous menace. Les godillots ont voté pour. Les socialistes ont mis du temps à se décider à voter contre. Les verts et les communistes pouvaient le faire sans état d’âme. Chacun connaît bien son électorat. Voilà où nous en sommes, un texte écrit pour se défendre de graves dangers est utilisé à des fins strictement électoralistes. On sait que ce texte qui permet de s’affranchir du respect des droits de l’homme a été très peu utilisé dans le passé. Je me sens d’ailleurs personnellement vexé, rétroactivement, que le gouvernement n’y ait pas eu recours en 1968.
Nous en sommes donc là. Un ministre de l’Intérieur qui prétend que nous sommes en guerre contre la « racaille » ; un Etat, incapable de remplir sa mission de rétablir l’ordre pendant presque trois semaines et un pays qui a peur de quelques gamins turbulents*.
Vous souvenez vous de cette chanson :

C'est l'homme à la face terreuse
Au corps maigre, à l'oeil de hibou,
Au bras de fer à main nerveuse
Qui sortant d'on ne sait pas où
Toujours avec esprit vous raille
Se riant de votre mépris

C'est la racaille
Eh bien, j'en suis !

C'est l'enfant que la destinée,
Force à rejeter ses haillons
Quand sonne sa vingtième année
Pour entrer dans nos bataillons.
Chair à canons de la bataille
Toujours il succombe sans cris...

C'est la racaille
Eh bien, j'en suis !

Paroles et musique de J. Darcier et J.B. Clément (1871).

*Si j'en crois le juge du tribunal des enfants de Bobigny, ce sont des gosses non connus des services de police issus de familles "ordinaires" contrairement au portrait dressé par l'histrion du Ministère de l'Intérieur et des Cultes.

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