29 septembre 2005

indemnisé

On peut reprocher au président algérien de demander par référendum aux victimes des massacres de pardonner sans demander aux assassins de s’excuser. Il semble difficile de bâtir une paix sur cette base. La France, elle, a fait mieux. François Mitterrand avait estimé en 1982 utile de rendre leur retraite aux militaires factieux qui avaient cherché à liquider la République. Chez nous : on ne pardonne pas, on excuse pas on paye.
Sait-on que la loi du 23 février 2005, connue comme scélérate pour obliger les enseignants à diffuser une vision « positive » de la colonisation contient un article 13 très intéressant ? On y lit la chose suivante.
Peuvent demander le bénéfice d'une indemnisation forfaitaire les personnes de nationalité française à la date de la publication de la présente loi ayant fait l'objet, en relation directe avec les événements d'Algérie pendant la période du 31 octobre 1954 au 3 juillet 1962, de condamnations ou de sanctions amnistiées, de mesures administratives d'expulsion, d'internement ou d'assignation à résidence, ayant de ce fait dû cesser leur activité professionnelle (…).
En effet il pouvait sembler injuste que seuls les militaires soient bien traités. Les pauvres civils qui avaient dû prendre le chemin de la clandestinité pour aller, au nom de l’OAS « casser du bougnoule » se verront ainsi indemnisés. Finalement dans tous les cas les victimes ont toujours tort de mourir. Il n’y aura pas de pension pour leurs veuves. Ce qui importe c’est d’être un guerrier, un vrai, légitime ou non vous serez récompensé.

28 septembre 2005

violeur

Au temps de Louis XIV on racontait aux jeunes filles des histoires à la veillée. Le grand méchant loup était là pour leur rappeler l’existence du violeur tapis au coin du bois. Depuis les contes ont été édulcorés et l’on aimerait espérer un moyen moderne de faire disparaître les violeurs. M. Clément, ministre de la justice français le sait bien. Son appel démagogique d’hier joue sur une corde sensible.
Mais son propos le conduit à se comporter lui-même en violeur d’un principe fondamental. Il le sait et n’hésite pas à jouer cyniquement les maîtres chanteurs :
"Il y a un risque d'inconstitutionnalité. Les événements récents vont me pousser à le prendre et tous les parlementaires pourront le courir avec moi. Il suffira pour eux de ne pas saisir le Conseil constitutionnel et ceux qui le saisiront prendront sans doute la responsabilité politique et humaine d'empêcher la nouvelle loi de s'appliquer au stock de détenus", a-t-il dit.
Au temps de Louis XIV, on risquait d’être violé(e) au coin du bois mais on risquait tout aussi bien de se voir jeter en prison pour une infraction commise de bonne foi car il n’y avait pas de loi pour l’interdire. C’est pour cela qu’en 1989 on inscrivit dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen un principe absolu :
Article 8 – (…) nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée.
Il s’agissait d’en finir avec l’arbitraire et ce principe a été depuis adopté par toute les nations « civilisées ».
L’Europe l’a inscrit en toute lettre :
Art. 7 - Non-rétrocativité de la loi pénale - Légalité criminelle
Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d'après le droit national ou international. De même il n'est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'infraction a été commise.
Il y a des moyens de se prendre aux violeurs récidivistes sans jouer les apprentis sorciers, sans écorner l’un des fondements même de nos libertés.

16 septembre 2005

criminel

Des enfants sont morts à Paris cet été dans l’incendie de leurs maisons. Selon le président de la Ligue des droits de l’homme, aucun homme politique ne s’est rendu à leur enterrement. La réponse est venue du Ministre de l’Intérieur : on expulse les squats. La ville n’entend pas les reloger car elle ne veut pas « cautionner les coups médiatiques de M. Sarkozy ». Ils sont donc à la rue. On arrête des parents sur leur lieu de travail, comme des criminels. Depuis la rentrée scolaire, on arrête des enfants dans leur classe, on les conduits au commissariat comme des otages pour piéger les parents. Ceux-ci sont alors arrêtés. On passe les menottes aux personnes arrêtées. Comme des criminels.
En France, dans nos villes, nos entreprises, des hommes, des femmes, des enfants vivent sans droits, sans protection, dans la peur et la suspicion. Traités comme des criminels. Les droits les plus élémentaires leur sont refusés. Dans l’indifférence quasi générale.

06 septembre 2005

quotidien

Nous avons toujours le sentiment d’une grande liberté personnelle. Pourtant pour l’historien qui peut regarder au fil des siècles, notre vie quotidienne échappe de moins en moins aux pouvoirs publics et à toutes sortes de contrôle. Au XIX° siècle on ne connaissait guère que l’état-civil, l’école et l’armée. Avant moins encore. Aujourd’hui nous sommes cernés. Même notre vie physiologique est contrainte par les institutions. La vaste organisation aux mailles de plus en plus serrées dans laquelle nous nous mouvons essaye de colmater toutes les brèches et y réussit admirablement bien. Il faudrait vivre au fond de la forêt de Nouvelle Guinée pour retrouver l’impression de la liberté et de la responsabilité de soi. C’est en ce sens que je dis que notre vie quotidienne n’échappe pas aux pouvoirs publics. Et tout d’un coup je m’interroge : en quoi le pouvoir peut-il être public ?
Et encore comment la vie pourrait-elle être autre que quotidienne ? En connaissez-vous d’autre ou est-ce que même les mots sont pris dans les chaînes du pouvoir ? Ou est-ce par les mots que cette dictature s’exerce ?